A Dakar, nombreuses sont les écoles qui sont confrontées au développement anarchique du petit commerce aux alentours des établissements scolaires. Entre bruits incessants, risques d’accidents et environnement insalubre, la « cantinisation » des Lieux d’apprentissage devient une source de stress pour les élèves et les enseignants.
La capitale sénégalaise est un épicentre commercial dense, où les activités vont bon train à longueur de Journée. Presque dans chaque commune, des centres névralgiques de petit commerce sont établis, au grand bonheur des clients et des usagers. Cependant, l’ascension fulgurante de cette activité dans les emprises scolaires prend de plus en Plus, une ampleur non enviable. Dans certaines communes de la capitale, une « cantinisation » excessive semble gagner les écoles. Les cantines sont dressées aux alentours des établissements scolaires, occupant presque tout le pourtour des lieux apprentissage. Une situation qui gêne de nombreux observateurs, car pour beaucoup, un bon environnement scolaire ne rime pas avec le tintamarre et le vacarme des marchés et des échoppes. La Biscuiterie, une commune surpeuplée, fait face à un envahissement excessif des cantines. Le plus étonnant, c’est que les écoles sont logées au cœur du marché ou à proximité de centres commerciaux. Pourtant, dans cette commune, la frontière était bien définie entre les écoles et les lieux de commerce. À l’école Biscuiterie A, récemment baptisée Doudou Wade, les écoles sont entourées de boutiques et le marché, situé de l’autre côté, ne cesse d’étendre ses tentacules vers les établissements scolaires. En l’absence du directeur d’école, c’est Daouda Diatta, son adjoint, qui parle du sujet. « La cantinisation des écoles est quelque chose de gênant. Parfois, le marché est tellement animé qu’on est obligé de faire le tour des cantines pour leur demander d’arrêter la musique ou de diminuer le bruit », ехplique M. Diatta. L’animation et le trafic incessant de voitures créent parfois un bruit assourdissant, perturbant la quiétude des enseignants et des élèves. Aussi, avec le trafic de livreurs qui viennent débarquer les marchandises des commerçants, la sécurité des élèves est également menacée. « Il est arrivé que des élèves soient heurtés par des voitures », fait savoir Daouda Diatta. Face à cette insécurité menaçante, les élèves sont interdits parfois de sortir hors de la cour de récréation pendant la pause, a-t-il ajouté. C’était le cas lors de notre passage. Dans la cour remplie d’élèves joyeux de partager ces moments de répit, on surveille la porte avec bienveillance. Le gardien veille au grain pour empêcher les élèves de franchir la porte d’entrée. Une situation que déplore M. Diatta. Il dénonce fermement la prolifération des échoppes devant les écoles. Selon lui, les établissements scolaires n’en tirent presque rien sur le plan économique. Selon lui, une compensation financière devrait même être imposée pour soutenir les établissements. L’école El Hadj Mamadou Sakho, dans la même commune, se situe à la lisière avec la commune des Hlm. L’établissement souffre de l’envahissement du grand marché des Hlm, un lieu de commerce fréquenté tout au long de la journée. Ce marché attire de nombreux commerçants, ce qui a conduit la mairie à empiéter sur l’emprise de l’école.
Les collectivités territoriales interpellées
L’un des responsables de l’établissement, sous couvert de l’anonymat, déplore l’obstruction des voies qui y mènent. « Nous avons un problème de mobilité, surtout avec ces encombrements », regrette-t-il. Mais ce qui perturbe particulièrement à l’école Cheikh Mamadou Sakho, c’est bien l’animation musicale pendant les périodes de grandes affluences au marché Hlm, notamment les veilles de fêtes. Selon lui, dès que la musique commence, les élèves sont perturbés et ne parviennent plus à se concentrer. Cap sur l’école Ndary Niang, au centre du populeux quartier de Bène Tally. Elle fait face au marché de Mbabass, le deuxième de la commune. À l’entrée, on peut voir des tables et échoppes commerciales installées le long du mur. Mamadou Diouf, le directeur de l’établissement, n’y va pas avec le dos de la cuillère. «L’école ne doit pas être un lieu de commerce. Le savoir compose avec calme et lucidité », affirme-t-il. Le bruit des commerçants et le ronronnement des voitures perturbent énormément la quiétude dans les apprentissages. Mais pour Mamadou Diouf, c’est surtout l’impact psychologique qui est le plus frappant. << Chaque fois que les enfants voient cette configuration, il y a quelque chose qui se crée dans leur esprit », explique-t-il. Face à cette situation, M. Diouf tente, avec ses collègues, de gérer au mieux les choses. « Nous sensibilisons les élèves et discutons avec les marchands qui exercent près de l’école pour éviter tout bruit ou toute installation de jeux de hasard », ex-plique-t-il. Mais ce qui agace le plus le directeur de l’école Ndary Niang, ce sont les tas d’ordures que laissent sur place les marchands entraînant ainsi une insalubrité indescriptible. Selon lui, la mairie doit prendre ses responsabilités et expulser les marchands des alentours de l’école. Il suggère la mise en place de barrières pour empêcher les marchands de s’installer tout prêt des écoles. Il préconise également l’embellissement des emprises. « Quand je suis arrivé, même le portail de l’école était obstrué par les marchands. Je me suis battu avec eux pour qu’ils libèrent l’entrée, j’ai fait déguerpir tout le monde et installé des bacs à fleurs un peu partout pour protéger notre environnement immédiat », a fait savoir Mamadou Diouf. Même, décor aux environs du rond-point Colobane, où des vendeurs à la sauvette prospèrent. Et pourtant, c’est dans cet espace commercial que se trouve l’école Al Fallah, pris au piège des échoppes et huttes de fortune. Djadji Dramé, le directeur de l’établissement, déplore le fait que l’emprise de son établissement soit envahie par diverses activités commerciales. « Ils ont même réussi à nous prendre notre mur situé à l’arrière », déplore-t-il. Cette situation est d’autant plus déplorable pour une école qui accueillait entre 1.000 et 1.200 élèves, mais dont l’effectif ne dépasse plus les 600 élèves aujourd’hui. Beaucoup de parents ont cessé d’y inscrire leurs enfants à cause de cet encombrement. Selon Djadji Dramé, les perturbations des marchands sont constantes. Même les odeurs dégagées par les restaurants irritent les narines des élèves et des enseignants», fait-il remarquer. Il interpelle les autorités pour qu’elles prennent des mesures idoines afin de garantir un environnement scolaire serein et propice aux enseignements-apprentissages.
Le soleil